Je copie-colle ici l’article que j’ai publié sur le blog de ma boîte.
L’échec sur les ordinateurs personnels, …
Le sujet est objet à polémique parmi les férus de logiciels libres : quel est l’avenir du poste de travail libre ?
Créé au début des années 1990, le poste de travail libre (GNU/Linux, le plus répandu) n’a cessé de s’améliorer, au point d’être régulièrement annoncé comme l’avenir du marché du poste de travail, et cela depuis une bonne dizaine d’années. Les tenants de cette position rappellent que si la grande majorité des serveurs Web fonctionne sous Linux, c’est qu’il y a bien des raisons – sécurité, stabilité, performance, compatibilité – qui finiront par faire « triompher » le poste de travail libre sur les ordinateurs personnels.
Or le marché n’a jamais paru aussi favorable à ce renversement que ces dernières années. L’échec médiatisé du système d’exploitation Windows Vista de Microsoft, la qualité de distributions Linux conçues pour le grand public (telles qu’Ubuntu ou Mandriva) et la migration massive de certaines administrations (l’Assemblée nationale, la Gendarmerie…) devaient notamment faire de l’année 2008 celle de l’explosion de Linux.
Cela n’a pas été le cas, loin de là, puisque Linux équipe aujourd’hui environ 1% des ordinateurs personnels dans le monde, une part de marché à laquelle il stagne depuis des années. De nombreuses raisons ont été données pour expliquer cette inertie : le coût induit par une migration, les compatibilités partielles des principaux outils (au premier rang desquels OpenOffice) avec le monde propriétaire, la peur des utilisateurs, ou encore le support insuffisant des fonctions les plus récentes, notamment multimédia, pour des raisons légales ou de moyens. Deux ans plus tard et face au succès commercial de la dernière mouture de Windows, les avis s’accordent à dire que l’heure d’une diffusion massive de Linux sur les postes de travail est passée.
… le développement de la mobilité, …
Cela étant dit, un nouveau facteur est en passe de révolutionner le poste de travail, ouvrant de nouvelles perspectives pour le « libre » au-delà de la question du système d’exploitation : la demande de mobilité.
Quand il présente l’iPad en 2010, Steve Jobs compare le marché des ordinateurs à celui des véhicules aux Etats-Unis au début du XXè siècle, quand dans ce pays encore agraire se vendaient avant tout des camions. Avec l’exode rural et le développement des villes, détenir une voiture est progressivement devenu la norme pour chaque ménage, modifiant ainsi la chaîne de valeurs associée aux véhicules – la notion de confort devenant notamment beaucoup plus importante – tandis que les camions n’étaient plus utilisés que par une minorité, pour des raisons professionnelles.
De la même façon, le poste de travail fixe semble voué à devenir une machine de niche : l’enjeu stratégique d’un SI d’entreprise ne réside pas tant dans la puissance ou même l’ergonomie d’un système d’exploitation (et de son bureau), mais dans son adéquation au métier et l’accès qu’il offre aux différentes fonctionnalités et applications. L’élément critique du poste de travail se trouve là, et commande tout projet de migration.
Aujourd’hui un grand nombre d’applicatifs métiers, généralement les applicatifs historiques, sont encore des applications lourdes, installées sur le poste client en environnement Windows. Mais le développement des applications Web et des portails métiers, l’avènement du Cloud computing et les possibilités de la virtualisation permettent de détacher les fonctionnalités métiers du système d’exploitation en lui-même. Accessibles en situation de mobilité, ces solutions permettent le travail en nomadisme, grâce à une connectivité accrue avec et entre les applicatifs métiers. Et elles offrent aux organisations la possibilité de passer à des infrastructures full web, sans perdre en fonctionnalités.
La forte baisse du marché des ordinateurs fixes et l’explosion de celui des netbooks -ces mini ordinateurs portables aux performances limitées, mais légers, autonomes et vendus à bas prix- illustrent bien que la priorité d’un acheteur, même dans un cadre personnel, ne va plus tant aux performances de la machine qu’à sa capacité de mobilité (alliant légèreté, autonomie et connectivité). Comme un symbole, la part de marché d’Android (le système d’exploitation développé par Google, à partir d’une plateforme Linux, pour les appareils mobiles) dans le trafic Internet mondial dépassera en 2011 celle de tous les ordinateurs personnels sous Linux.
… et la nécessité des standards.
La fonction centrale d’un poste de travail étant l’accès à l’ensemble des applications métiers, qui sont de plus en plus distantes, la fonction cruciale du système d’exploitation devient sa capacité à produire un accès et un rendu parfait à l’utilisateur. Or selon la technologie employée (format standard ou propriétaire, nécessitant ou non un plug-in dans le navigateur, etc.), cette propriété est inégalement partagée par les différents systèmes d’exploitation.
Par conséquent, seule l’adoption de formats standards, ouverts, pourra garantir aux différents éditeurs un rendu sans-faille de leurs applications métiers sur tous les postes de travail, libres comme propriétaires. Cette exigence d’ouverture des applications est d’autant plus importante qu’elle est également le seul moyen de garantir la pérennité des données et l’interopérabilité des systèmes.
La diffusion d’applications Web open-source dans le monde professionnel (Alfresco, pour ne prendre qu’un exemple célèbre) et l’adoption progressive du standard HTML5, qui permet une diffusion multimédia standardisée sur les pages web, vont dans ce sens.
Par conséquent, si le marché des PC paraît définitivement fermé à Linux, le potentiel de développement est à coup sûr très fort sur les appareils mobiles, où les systèmes libres, Android ou encore WebOS, concurrencent déjà largement leurs équivalents propriétaires et concentrent le plus fort potentiel d’innovation, pourvu que s’impose à tous le respect des standards.